Sans
titre[1],
dans
son refus de donner une ligne générale, un nom qui pourrait déterminer un sens de
lecture à l’ensemble, ou plutôt en donne un, dans l’indétermination de sens de
cette phénoménologie du promeneur, est l’exploration d’un espace autant
physique – géographique si l’on veut, si l’on peut qualifier ainsi la familiarité
d’un lieu – que mental, dans le traitement de ce qui est perçu : « Où
cela fut si cela fut ». La
poésie de Squires est faite de mouvements infinitésimaux, répétitions à peine (« nombreux
nombreux petits mouvements / d’abord incertains […] », dans un lexique
simple et simplifié : arbres, feuilles, lumière, eau, air… La
contemplation de ces « petits endroits / qui ne méritent pas de nom »,
se heurte à l’effort de penser le lieu, à celui d’en abstraire une conception globale :
« Trouver des histoires / à ces arbres / narratifs dans leur feuillage / une
raison à leur densité » et « leur trouver un passé quelque chose / qui leur fait défaut »,
car de fait ils ne sont que « simplement ce qu’ils sont ». Ces
mouvements de l’œil, de la pensée à l’œuvre, abstraction de l’idée qui se
trouve un fil ténu de sens (« Doucement
arrange ordonne classe »), sont sans arrête en butte
à ce paradoxe : « Que cela soit ou contenu en soi ». Le geste du
regardeur se répète, met en scène cette répétition[2] « qui
ne veut rien dire de plus », car son sens échappe, autant que celle de l’espace
exploré : « C’est un endroit que l’on a atteint / là ou à peine ou à
quoi bon. » Reste l’amplitude du geste, ligne du poème, magnifique.
Geoffrey Squires, Sans titre, traduit de l’anglais (Irlande) et préfacé par François Heusbourg, ÉditionsUnes
[1] Untitled III (2002), nous indique la note sur l’édition, qui achève
une série de trois textes.
[2] « on y revient sans cesse »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire